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Vente d’immeuble et vice caché par le vendeur : quelle action et quelle indemnisation pour l’acquéreur ? Précisions de la Cour de cassation

Civil - Responsabilité
10/02/2020
L’acquéreur d’un immeuble atteint de vices cachés nécessitant sa démolition est fondé à agir en indemnisation et à obtenir du vendeur de mauvaise foi des dommages et intérêts équivalant au coût de sa démolition et de sa reconstruction.
Il résulte de l’article 1645 du Code civil que le vendeur qui connaissait les vices de la chose est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

M. T. vend une maison d’habitation aux époux B. À la suite de l’apparition de désordres et après expertise, M. et Mme B. assignent le vendeur en garantie des vices cachés, ainsi que l’agent immobilier et la SCP notariale sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

Selon l’arrêt rendu sur renvoi après cassation, le vendeur est condamné à restituer aux acquéreurs une partie du prix de vente et à leur payer le coût des travaux de démolition et de reconstruction de l’immeuble. Elle a également fixé à 10 % chacun la part de cette condamnation que le notaire et l’agent immobilier devraient supporter au titre de leur responsabilité délictuelle.

Le vendeur, le notaire et l’agent immobilier intentent un pourvoi. Ils allèguent notamment la violation de l’article 1645 du Code civil et celle du principe de réparation intégrale du dommage, considérant que l’allocation de dommages-intérêts incluant le coût intégral des travaux de démolition et de reconstruction de la maison permettait de faire l’acquisition d’un bien entièrement neuf pour le prix d’un bien ancien, dégradé et vétuste qu’ils avaient initialement décidé d’acquérir.

Une action en indemnisation autonome. La Cour de cassation rappelle que la demande de dommages-intérêts est autonome : « il résulte de l’article 1645 du Code civil que le vendeur qui connaissait les vices de la chose est tenu de tous les dommages-intérêts envers l’acheteur, qui peut exercer l’action en indemnisation indépendamment de l’action rédhibitoire ou estimatoire (Cass. com., 19 juin 2012, n° 11-13.176, Bull. civ. IV, n° 132 ; Cass. 1re civ., 26 sept. 2012, n° 11-22.399, Bull. civ. I, n° 192 ; Cass. 3e civ., 24 juin 2015, n° 14-15.205, Bull. civ. III, n° 66) ».

Une réparation de l’intégralité du préjudice subi. – La Haute juridiction ajoute que, « lorsque l’immeuble vendu est atteint de vices cachés nécessitant sa démolition, l’acquéreur qui a choisi de le conserver sans restitution de tout ou partie du prix de vente est fondé à obtenir du vendeur de mauvaise foi des dommages et intérêts équivalant au coût de sa démolition et de sa reconstruction ».

La cour d’appel a relevé que les acquéreurs, qui avaient choisi de conserver l’immeuble, ne demandaient que des dommages-intérêts en indemnisation de leur préjudice sur le fondement du texte précité. Elle a énoncé que le vendeur de mauvaise foi peut être condamné à des dommages-intérêts correspondant à l’intégralité du préjudice subi ; l’acquéreur est en droit de demander la réparation de tout préjudice imputable au vice. La qualité de vendeur de mauvaise foi de M. T. était établie. La cour d’appel a, à bon droit, retenu que les évaluations de l’expert judiciaire étant reprises, la nouvelle habitation aura la même superficie que l’ancienne et le préjudice subi par M. et Mme B. ne pouvait être réparé, sans enrichissement sans cause, que par la démolition et la reconstruction du bâtiment, seules de nature à mettre fin aux vices constatés, y compris d’implantation.

Elle a pu en déduire, répondant aux conclusions de l’agent immobilier et statuant sur l’objet de la demande, sans opérer un rééquilibrage du contrat, que la demande en indemnisation des acquéreurs, incluant le coût des travaux de démolition et de reconstruction, devait être accueillie et constituait le montant d’indemnisation sur laquelle devait s’exercer la garantie du notaire et de l’agent immobilier.
 
Pour aller plus loin, Le Lamy Droit de la responsabilité, nos 447-22 et s., Le Lamy Droit de l’immobilier, nos 3967 et s., Le Lamy Assurances, n° 2294 et Le Lamy Droit du contrat, n° 2448.
Source : Actualités du droit