Retour aux articles

La semaine du droit des entreprises en difficulté

Affaires - Commercial
14/09/2020
Présentation des dispositifs des derniers arrêts publiés au Bulletin commercial de la Cour de cassation, relatifs au droit des entreprises en difficulté.
 
Liquidation judiciaire – indivisibilité
« Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 31 octobre 2018), la SCI Clodeleva (la SCI) a été mise en redressement judiciaire le 9 mai 2017, Monsieur X étant désigné mandataire judiciaire.
Sur demande de ce dernier, le tribunal a converti la procédure en liquidation judiciaire et désigné la société BTSG² liquidateur. La SCI a fait appel de la décision.
(…) Vu les articles L. 661,1,2°, et R 661-6, 1°, du Code de commerce, et l'article 424 du Code de procédure civile :
 Il résulte de la combinaison de ces textes que, si le débiteur qui fait appel du jugement prononçant sa liquidation judiciaire doit intimer les mandataires de justice, à raison du lien d'indivisibilité existant, en cette matière, entre le débiteur et ces mandataires, un tel lien n'existe pas à l'égard du ministère public, partie jointe, auquel il appartient seulement à la cour d'appel de communiquer l'affaire.
Pour déclarer irrecevable l'appel de la SCI, l'arrêt retient que la faculté ouverte au ministère public par l'article L. 661,1, 2°, du code de commerce de former appel du jugement qui prononce la liquidation judiciaire le met sur le même plan que les autres parties à la procédure, d'autant qu'il doit être en mesure de faire connaître son avis en appel. Il en déduit qu'au titre de l'indivisibilité applicable en matière de liquidation judiciaire, il appartenait à la SCI de le mettre en cause en dénonçant l'assignation au procureur général.
En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Cass. com., 9 sept. 2020, n° 18-26.824, P+B*
 
Procédure collective – instance en cours
« Vu les articles L. 622-22 du Code de commerce et 372 du Code de procédure civile :
Il résulte du premier de ces textes que les instances en cours tendant au paiement d'une somme d'argent sont interrompues par l'ouverture d'une procédure collective à l'égard du débiteur et ne sont régulièrement reprises qu'après que le créancier poursuivant a procédé à la déclaration de sa créance et mis en cause le mandataire judiciaire et, le cas échéant l'administrateur. Selon le second texte, les actes accomplis et les jugements même passés en force de chose jugée, obtenus après l'interruption de l'instance, sont réputés non avenus.
Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 23 juillet 2018), M. X a assigné, le 10 novembre 2015, la SCI Antilles pour Jules (la SCI) en paiement de dommages-intérêts. Une procédure de sauvegarde a été ouverte à l'égard de la SCI par un jugement du 8 décembre 2015 qui a nommé un administrateur judiciaire avec une mission d'assistance. Un jugement du 3 novembre 2016 a condamné la SCI à payer à M. X des dommages-intérêts, sans que l'instance ait été préalablement reprise. La SCI en a relevé appel sans l'assistance de l'administrateur.
La cour d'appel ayant déclaré l'appel irrecevable, la SCI a formé un pourvoi en cassation.
Toutefois, en raison de l'ouverture de la procédure de sauvegarde de la SCI, l'instance en cours avait été interrompue de plein droit devant le tribunal, qui n'était pas dessaisi, et devait être reprise devant lui après justification de la déclaration de créance et la mise en cause du mandataire judiciaire et de l'administrateur. De même qu'il n'y avait pas lieu pour la cour d'appel, qui devait se borner à constater que le jugement était réputé non avenu, de statuer sur l'appel, il n'y a pas lieu de statuer sur le pourvoi formé contre l'arrêt, lui-même réputé non avenu ».
Cass. com., 9 sept. 2020, n° 18-25.365, P+B *
 
Plan de redressement – créance
« Selon l'arrêt attaqué (Caen, 11 septembre 2018), Mme X a fait exécuter en 2009 par la société Leluan Map des travaux de bardage qui ont été réceptionnés avec réserves le 10 septembre 2010. La société Leluan Map a été mise en redressement judiciaire le 26 juillet 2012, M. Y étant désigné administrateur judiciaire et la société Z mandataire judiciaire. Un plan de redressement a été arrêté le 17 juillet 2013, M. Y devenant commissaire à l'exécution du plan.
Mme X, qui n'avait déclaré aucune créance, a, au vu d'un rapport d'expertise, assigné, le 2 octobre 2013, la société Leluan Map ainsi que le mandataire judiciaire et le commissaire à l'exécution du plan en demandant en cause d'appel que la responsabilité de la société soit reconnue et sa créance d'indemnisation évaluée.
La société Leluan Map et son mandataire judiciaire ont opposé l'irrecevabilité de la demande.
 
La cour d'appel a énoncé que Mme X, qui n'a pas déclaré sa créance de dommages-intérêts pour malfaçons, de sorte qu'en application de l'article L. 622-26, alinéa 2, du Code de commerce, cette créance est inopposable à la société Leluan Map pendant l'exécution du plan de redressement de celle-ci et après si les engagements pris ont été tenus, ne pourra recouvrer son droit de poursuite individuel qu'en cas de résolution du plan.
Dans ce cas, elle pourra agir en paiement de dommages-intérêts contre la société débitrice, sans que puisse lui être opposée la prescription de son action, dès lors que, jusqu'à la clôture de la procédure collective, cette prescription aura été suspendue par suite de l'impossibilité dans laquelle elle se sera trouvée, comme tout créancier, y compris celui qui n'a pas déclaré sa créance, de poursuivre son débiteur.
Il en résulte que Mme X est sans intérêt à demander qu'il soit statué par anticipation au cours de l'exécution du plan sur le principe et le montant de sa créance de dommages-intérêts. En déclarant irrecevable cette demande, la cour d'appel n'a, par conséquent, pas porté atteinte au droit de Mme X à un procès équitable, ni au droit au respect de ses biens ».
Cass. com., 9 sept. 2020, n° 19-10.206, P+B *

 
 
 
*Le lien vers la référence documentaire sera actif à partir du 14 octobre 2020
 
 
 
 
Source : Actualités du droit